J'ai découvert le livre de Florence Lautrédou, l'amour, le vrai (Ed. Odile Jacob, 2016) par la critique des 400 culs et le remarquable article d'Agnès Giard: qui veut jouer à la princesse? Je viens de le terminer en quelques heures.
A la réflexion, on peut très bien se contenter de lire l'article. J'exagère un peu mais pas tant. La première et la dernière partie de l'ouvrage m'ont vraiment intéressée même si la normalienne, agrégée de lettres modernes, psychanalyste et coach enfile parfois les poncifs. Par contre j'ai détesté les récits de vie imaginés qui constituent le corps de l'ouvrage. Très parisiennes, hors du monde, ces femmes dont il est question, sont celles d'Auteuil-Passy, déconnectées de la réalité du commun des mortelles. Les récits sont à la manière des revues féminines,"c'est mon histoire" dans Elle par exemple, ils semblent creux, exagérés, frivoles. L'auteur change de ton. Il faut lire entre les lignes afin d'en tirer la subtantifique moelle.
Le titre d'ailleurs est à l'image de ma déception, accrocheur, il s'agit davantage d'un livre de développement personnel qu'une analyse fine des archétypes qu'elle dénonce.
Cela dit, je pense qu'il n'est pas inutile d'écrire et de dire ce qui constitue notre fond de commerce à nous les femmes, enfermées dans nos croyances où l'on s'étiole par manque d'amour.
L'auteur rappelle, martèle ce qu'il ne faut pas oublier, afin de ne pas se perdre: la nécéssité de la connaissance de soi, de l'amour de soi et du respect de soi, beaucoup de soi, certes mais fondamentaux. Ces piliers s'acquièrent tôt pour ceux qui ont bénéficié d'une enfance privilégiée ou d'une sagesse précoce (p. 215) tardivement pour d'autres.
Elle souligne combien les femmes sont marquées par les archétypes que sont l'indifférence, la peur et la passivité: l'indifférence vis à vis d'elles-mêmes, la peur celle de la solitude, d'être une femme seule, et enfin la passivité face à l'ennui d'une vie sans amour, s'oubliant dans l'éducation des enfants et/ou dans une vie professionnelle pleine.
Alors oui, elle enfile les poncifs, cependant elle rappelle à quel point les modèles féminins qui ont bercé notre enfance (cette conne de petite sirène qui se mutile par amour), les romans du XIXème siècle où les héroïnes sont tuées par leurs auteurs (Emma Bovary, Anna Karénine) constituent encore trop souvent des modèles qui cantonnent les filles ou ont cantonné les femmes de ma génération dans des rôles destructeurs. Ma mère me lisait avec délectation la petite fille aux allumettes mourant de froid et de faim, je m'y voyais punie, seule abandonnée, mourant, gelée pour avoir désobéi. J'ai lu pour les besoins de ma thèse, la déchéance de Cosette obligée de vendre ses incisives afin de manger sans se prostituer.
Cependant, le livre est limpide, clair, comme en psychanalyse, ce qu'on découvre sur le divan est au final simple, très simple, et totalement libérateur. Dire "ah mais moi, je n'ai pas besoin, je m'analyse sans problème, je sais très bien ce qu'il en est", tout en restant enfermé, enquillé, englué, anéanti dans son mal-être, la relation pourrie, la souffrance, la répétition sans pouvoir en sortir, prouve à quel point il ne suffit pas de croire savoir, pour s'aimer, se respecter et se connaître.
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