J'aime la photographie de ces deux hommes décontractés, posant assis sur un banc devant le photographe. Pas de date mais quelques hypothèses nées d'une observation légère, non approfondie. L'usage d'une loupe permettrait à l'oeil de disséquer les regards, la moue, le poil. Je me promets d'investir afin de mieux enquêter.
La tenue vestimentaire, les chapeaux mous, la moustache qui faisait fureur à l'époque (hin hin), les chaussures vernies ou cirées, laissent à penser qu'elle date des années trente, plus près d'ailleurs de 1939. Elle est légendée au dos, mais malheureusement rien qui puisse enrichir la description, juste trois mots: Lucien Baudras et papa. Un rapide sondage sur généanet n'a rien donné, quelques Baudras dans l'est, et près de Tours.
La photographie a donc échappé à la sélection draconienne que font les vendeurs en vidant les greniers, les vieilles armoires où la grand-mère cachait ses billets et ses photographies. Ils éradiquent tout ce qui pourrait les identifier! Cela dit, il y a fort à parier qu'elles atterrissent chez les bouquinistes car plus personne n'est en mesure de mettre un nom sur les visages. Les derniers témoins pouvant raconter l'histoire familiale sont morts ou ne se souviennent plus de rien, les divorces, les séparations, les remariages n'ont rien arrangé dans le méli-mélo familial. Les boîtes à chaussures, les cartons remplis de vieux clichés, sont brûlés ou cédés pour une bouchée de pain à condition qu'aucun personnage ne puisse être identifié. Comme si il y avait quelque honte à disperser les souvenirs. Ni vus ni connus, ils ne pourront être accusés d'avoir bradé papa, d'avoir liquidé le passé en échange de pièces sonnantes et trébuchantes.
Ici, rescapé de l'effacement, "Lucien Baudras" semble plus décontracté que "papa" dont la main caresse une joue mal rasée. Il y a probablement meilleur endroit pour entreprendre une conversation légère, entre planches à l'abandon et trottoir défoncé. Cependant, la scène est immortalisée.
Pourquoi elle me plaît?
Une allure, une atmosphère, un ton particulier, une franchise dans le regard du jeune homme, la jambe en l'air, le talon en équilibre sur un pavé, un contentement apaisant.
Pourquoi elle me plaît?
Une allure, une atmosphère, un ton particulier, une franchise dans le regard du jeune homme, la jambe en l'air, le talon en équilibre sur un pavé, un contentement apaisant.
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