dimanche 7 avril 2013

Cheveux chéris ....



Persuadée que nous aurions à nous cailler comme des bêtes dans les longues files d'attente du quai Branly, c'est de bon matin que j'ai pris des billets coupe-file pour une exposition alléchante par son thème : Cheveux chéris. J'avais souvenir de caillantes dans le vent, devant des cerbères ravis de fermer la barrière à la barbe du client avide de découvertes culturelles, le rictus sur les lèvres, mais c'est le désert que l'on a trouvé, trois pelés et un tondu se pressaient au musée, sombre comme le gris du ciel.  
Hormis les têtes réduites dont j'avais  vu un aperçu sur le site du musée, j'imaginais du grandiose, des tonnes de cheveux, des  choucroutes, des tresses, des perruques, des brosses et des peignes, des bigoudis, des sèche-cheveux antiques, des onguents gomineux et des recettes miracles afin de les conserver soyeux,  bref du quotidien et du sacré.
Le mélange des genres est à l'image du musée, un poil décevant, même si les textes informatifs sont bien faits  et instructifs. Le cheveu ne se conserve pas sauf chez les peuplades primitives, (donc pas tant),  qui ont su les faire durer pour l'éternité. La première partie de l'exposition "frivolités" est peu lisible, terne ce qui n'est pas le cas concernant l'exposition des objets ethnographiques du musée, mis en exergue pour notre plus grand plaisir et notre plus effroyable répugnance.
 Un film terrible sur la tonte des femmes à la Libération fait le lien entre les deux parties. Monté pour l'évènement, il montre la jubilation des hommes dont la virilité fut bafouée pendant les années d'occupation, retrouvé alors toute leur puissance aux dépens des femmes, la clope au bec, jouissant littéralement la tondeuse à la main, exhibant ces accusées de collaboration horizontale,  sous les cris et les rires gras de la foule. On mesure à quels points les cheveux sont consubstantiels de la féminité. Les caméramans filment des visages ravagés, asexués,  maltraités, tuméfiés, marqués de croix gammées,  devenus objets de haine  et de honte.
La seconde partie met en exergue les reliques, les trophées, conservés afin de conférer à leurs propriétaires la force et la magie des ancêtres ou des victimes héroïques, mortes après s'être bien battues.

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